L’intellectuel ghanéen George Ayittey ne cesse de dénoncer
l’approche des pays africains dans leurs relations avec la Chine: “L’ennemi de
mon ennemi est un ami”. En effet, beaucoup de pays africains continuent à considérer
les Occidentaux comme des ennemis qui cherchent toujours à revenir coloniser
l’Afrique par la petite porte. Ce qui les pousse à être enclins à faire
confiance aux pays émergents, notamment la Chine, qui se présente toujours
comme du tiers monde même s’il est plus avancé économiquement que la majorité
des pays africains. La Chine est spécialement instrumentale dans la recherche
du partenariat avec les pays africains, et elle finance beaucoup de projets en
Afrique, et donne une aide « sans conditions" aux pays africains. Les présidents
africains l’accueillent à bras ouvert comme un pays « ami ».
Le même scenario est en train de se dessiner avec La
Turquie, qui manipule
les pays africains comme des pays « frères » en
les appelant à « une résistance
commune de la Turquie et de l'Afrique » face à un hypothétique «
nouveau modèle de colonisation ». Or ce que George Ayittey dit de la Chine est
aussi valable pour la Turquie : ce n’est pas un pays ami. En tous cas, il
n’est ni plus ni moins ami que les Etats-Unis, la France ou la Suède. Comme les
autres pays, occidentaux ou pas, la Turquie ne cherche que ses propres intérêts.
La Turquie est la 18e économie mondiale, elle a besoin d’écouler ses
marchandises. C’est pourquoi elle demande aux pays africains le libre échange.
Nos pays africains devraient évacuer toute forme d’émotion
dans leurs relations avec la Turquie et mettre en avant eux aussi leurs propres
intérêts. Ainsi, ils devraient se demander : le libre-échange avec la
Turquie est-il favorable aux pays aux pays africains? Pour la majorité de
ces pays, la réponse est non. Beaucoup de nos pays ne sont pas encore suffisamment
industrialisés, ce qui signifie que laisser les produits turcs inonder les pays
africains seraient décourager l’espoir d’industrialisation de ces pays.
Je ne dis pas que les pays africains ne devraient
pas faire des affaires avec la Turquie. Je dis qu’il faut veiller à ce que ces
affaires soient avantageuses aux peuples africains. Pour que ça soit le cas, il
faut savoir ce que nous voulons en tant que peuples. Et je pense, sans risque
de me tromper, que chaque peuple veut s’épanouir, ça veut dire être libre et
riche. Or, aucun pays au monde ne s’est enrichi sans s’industrialiser. Ce que
nous pouvons gagner de la Turquie, ce sont les capitaux. La Turquie est
relativement riche. Au lieu de nous inonder avec des produits finis, demandons
aux turcs, de venir investir en Afrique, de donner du travail aux Africains, et
de nous faire profiter de leur savoir-faire technique que beaucoup de pays
africains non pas. Ca, ce sera une relation gagnant-gagnant : ils
empocheront les bénéfices sur leur capital, et nous, nous aurons du travail pour
beaucoup d’Africains.
Refuser de se faire instrumentaliser par le président Erdogan
Le journal Jeune Afrique rapporte que, à part les
relations commerciales, la Turquie
invite les pays africains à se méfier de Fethullah Gulen, le principal
adversaire politique du président Erdogan accusé d’être derrière le coup d’Etat
raté. La confrérie de Gullen aurait des réseaux d’écoles et d’universités dans
en Afrique que la Turquie incite les pays africains à fermer. Visiblement, le
pouvoir turc veut utiliser les pays africains pour se débarrasser de ses
ennemis intérieurs. Sur ce point, les leaders africains devraient avoir le
courage de dire au président Erdogan : NIET. Gullen menace peut-être le
pouvoir personnel de Tayyip Erdogan. Mais jusqu'à présent, rien ne montre que
la confrérie de Gullen constitue une menace
pour les pays africains. Le président Erdogan est engagé dans une large
campagne de répression de tout ce qui ressemble à l’opposition et les pays
africains n’ont aucun intérêt à l’y aider.
Et si le président Erdogan cherche à s’approcher de
plus en plus des pays Africains, ce n’est pas par amour, mais parce qu’il est
de plus en plus isolé sur la scène internationale, les pays occidentaux n’hésitant
pas à s’indigner face à sa dérive
dictatoriale.
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